L'acte administratif unilatéral
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Par François Dietsch et François Meyer
Mise à jour par Karim Douedar : janvier 2019
Les collectivités territoriales disposent pour agir de deux types d’actes juridiques : le contrat qui est un acte plurilatéral fruit d’un accord entre les collectivités territoriales et les personnes privées et l’acte unilatéral.
Ce dernier doit son nom à la façon dont il est élaboré. Les destinataires de l’acte n’interviennent pas dans le processus, l’acte leur sera par conséquent imposé. C’est en cela que l’acte unilatéral traduit les prérogatives exorbitantes du droit commun qui caractérise l’action des collectivités territoriales comme celle de l’État et de son administration. L’acte administratif unilatéral se caractérise donc par un régime juridique particulier.
- 1. La théorie de l’acte administratif unilatéral
- 2. Le régime de l’acte administratif unilatéral
- 3. La motivation de l’acte administratif unilatéral
1. La théorie de l’acte administratif unilatéral
L’acte administratif unilatéral peut se caractériser par son auteur, par son contenu ou par sa forme :
L’auteur de l’acte - En principe l’auteur de l’acte administratif est une personne publique, mais dans un certain nombre de cas ce peut être une personne privée.
1.1. Les personnes publiques
Si en principe l’auteur d’un acte administratif est une personne publique pour autant tous les actes de toutes les personnes publiques ne sont pas des actes administratifs. Ainsi, le Conseil d’État a exclu de la catégorie « acte administratif », les actes législatifs et les actes juridictionnels. Par ailleurs, certains actes d’autorités administratives ne sont pas considérés comme acte administratif par le juge. Il s’agit des actes de gouvernement et les actes de gestion privée.
1.2. Les personnes privées
La situation ici est exactement inverse. Exceptionnellement leurs actes peuvent être administratifs. Dans un premier temps, le Conseil d’État a reconnu que des personnes qui n’étaient ni publiques ni privées pouvaient édicter des actes administratifs dans la mesure où elles étaient chargées d’une mission de service public. Par la suite, le Conseil d’État a admis que l’acte d’une personne privée exerçant une mission de service public comportant des prérogatives de puissance publique, présente le caractère d’acte administratif. Enfin, l’acte d’une personne privée gérant un service public à caractère industriel et commercial est un acte administratif s’il est relatif à l’organisation du service (TC 15 janvier 1968 époux Barbier).
Le contenu de l’acte - En principe, l’acte administratif est normateur, mais ces normes peuvent être générales ou individuelles.
1.3. Les actes réglementaires
Certains actes ont une portée générale et impersonnelle : il s’agit d’actes réglementaires. Ces actes précisent par exemple l’organisation des services ou encore fixent les règles statutaires d’un corps de fonctionnaire. Comme ces règles sont générales et impersonnelles l’acte réglementaire a une multitude de destinataires non précisés qui peuvent être l’ensemble des administrés ou seulement une catégorie d’entre eux.
1.4. Les actes individuels
Les actes individuels n’ont au contraire comme destinataires que des personnes nommément désignées. Qu’il s’agisse d’une seule personne ou de plusieurs. L’exemple type étant l’acte de nomination d’un fonctionnaire, mais ce peut être aussi un acte accordant une autorisation ou la refusant à telle personne.
La forme de l’acte - L’acte administratif unilatéral se caractérise par sa forme générale et par celle de ses différents éléments.
1.5. Décisions explicites et implicites
Les décisions explicites sont les actes les plus courants, ils expriment par écrit la volonté de leur auteur. C’est le cas des décrets, arrêtés ministériels ou non, bref de tous les actes formels, c’est-à-dire la presque totalité des actes de l’administration
Le silence gardé pendant plus de 2 mois par l'administration sur une demande ou une démarche vaut accord, sauf exceptions, par exemple en matière de demande de permis de construire. Pour certaines demandes, l'acceptation peut être acquise après un délai différent. Dans d'autres cas, le silence gardé sur une demande vaut refus. Tous ces cas d'exceptions sont prévus par les textes.
1.6. Les éléments de l’acte
Les actes administratifs comportent certains éléments qui jouent un rôle important : les visas (les textes en vertu desquels l’acte est pris) et les motifs (les faits qui justifient la décision).
2. Le régime de l’acte administratif unilatéral
Par régime juridique, il faut entendre les règles qui s’appliquent à l’élaboration de l’acte, à son exécution ainsi qu’à son application dans le temps.
2.1. Élaboration
Les actes administratifs sont élaborés par les autorités administratives souvent en informant le ou les destinataires mais aussi, de plus en plus, en sollicitant les avis d’organismes divers. Ainsi se développent des procédures contradictoires et des procédures consultatives.
2.2. Exécution
Si l’acte administratif unilatéral a force exécutoire en raison du privilège du préalable il ne fait pas nécessairement l’objet d’une exécution forcée.
2.3. Application dans le temps
Les actes administratifs existent dès leur signature par leur auteur. Cela signifie par exemple qu’un recours peut être intenté contre l’acte dès sa signature. Mais les actes administratifs ne sont opposables aux administrés qu’à compter du moment où ceux-ci peuvent en avoir connaissance. L’entrée en vigueur des actes est donc conditionnée par leur publicité, mais celle-ci est assurée de manière variable selon les types d’acte. Les actes réglementaires doivent être publiés soit au Journal officiel pour les décrets, soit dans les divers bulletins des ministères ou dans certains recueils d’actes administratifs. S’agissant des actes individuels il faut distinguer deux cas. Quand ils imposent des obligations, ils ne sont opposables qu’après notification qui s’effectue le plus souvent par simple lettre. Pour les autres actes, ils entrent en vigueur dès leur signature. Par ailleurs, il convient de préciser qu’il peut être mis fin à un acte administratif soit par abrogation, soit par retrait. Ces deux procédures obéissent à des règles spécifiques de mise en œuvre.
3. La motivation de l’acte administratif unilatéral
L'administration doit motiver (c'est-à-dire justifier) les décisions individuelles défavorables ou dérogatoires. Une décision défavorable peut être explicite (clairement exprimée par écrit) ou implicite (absence de réponse écrite).
3.1. Les décisions concernées
L'administration doit motiver les décisions suivantes :
- Mesure de police ou mesure restreignant l'exercice d'une liberté publique (exemple : expulsion d'un étranger)
- Décision infligeant une sanction (exemple : révocation d'un fonctionnaire)
- Octroi d'une autorisation soumise à des conditions restrictives (exemple : permis de construire soumis à des prescriptions spéciales)
- Annulation ou suppression d'une décision créatrice de droits (exemple : résiliation du contrat d'un agent non titulaire de la fonction publique)
- Prescription, forclusion ou déchéance (exemple : péremption d'un permis de construire)
- Refus d'un avantage étant un droit pour le demandeur (exemple : refus de versement d'une allocation à une personne réunissant les conditions d'obtention)
- Refus d'une autorisation sauf si la communication des motifs pourrait porter atteinte à un secret d'État
- Rejet d'un recours administratif dont la présentation est obligatoire avant tout contentieux (exemple, litige contractuel)
3.2. La motivation des décisions explicites
En cas de décision explicite, l'administration doit la motiver par écrit. Les motifs de la décision peuvent être indiqués dans un document joint (lettre d'accompagnement, rapport, avis, etc.).
La motivation doit être claire, précise et adaptée aux faits de l'affaire. Elle ne doit pas seulement mentionner la loi. Le juge administratif peut annuler une décision si elle n'est pas ou insuffisamment motivée.
La motivation doit être communiquée sans délai sauf en cas d'urgence absolue. En effet, une décision n'est pas illégale si une urgence absolue a empêché de la motiver. Toutefois, si l'intéressé demande les motifs dans les 2 mois de recours contentieux, l'administration doit les lui communiquer dans le mois.
3.2. La motivation des décisions implicites
En cas de silence de l'administration (décision implicite de rejet), l'intéressé peut demander les motifs de la décision dans le délai de 2 mois du recours contentieux. Les motifs doivent lui être communiqués dans le mois suivant sa demande. Il s'agit par exemple d'une administration qui ne répond pas à la demande d'un étranger sollicitant un titre de séjour.
Auteur(s) :
DIETSCH François et MEYER François
Thématique(s) :
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