Décrets d'application de la loi de transformation de la fonction publique : le détachement d'office

Modifié le 16 mai 2023

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L’article 76 de la loi n° 2019-826 du 6 août 2019, dite de transformation de la fonction publique, modifiant l’article 15 de la loi du 13 juillet 1983, prévoit que lorsque l’activité d’une personne morale de droit public employant des fonctionnaires est reprise par une personne morale de droit privé ou par une personne morale de droit public gérant un service public industriel et commercial (Spic), les fonctionnaires exerçant cette activité peuvent être détachés d’office, pendant la durée du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil, sur un contrat de travail conclu à durée indéterminée (CDI) auprès de l’organisme d’accueil. Ce contrat de travail comprend une rémunération au moins égale à la rémunération antérieurement versée (traitement, régime indemnitaire et, le cas échéant, nouvelle bonification indiciaire, indemnité de résidence et supplément familial de traitement) par l’administration, l’établissement public ou la collectivité d’origine. Les services accomplis en détachement dans l’organisme d’accueil sont assimilés à des services effectifs dans le corps ou le cadre d’emplois. Le fonctionnaire peut demander à ce qu’il soit mis fin à son détachement pour occuper un emploi au sein d’une administration. En cas de renouvellement du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil, le détachement du fonctionnaire est renouvelé d’office. En cas de conclusion d’un nouveau contrat entre la personne morale de droit public et une autre personne morale de droit privé ou une autre personne morale de droit public gérant un Spic, le fonctionnaire est détaché d’office auprès du nouvel organisme d’accueil. Cet organisme est tenu de reprendre les clauses substantielles du CDI dont bénéficie le fonctionnaire, notamment celles relatives à la rémunération. Lorsque le contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil prend fin, le fonctionnaire opte, soit pour sa radiation des cadres et le versement d’une indemnité prévue par décret s’il souhaite poursuivre son contrat de travail au sein de l’organisme d’accueil, soit pour sa réintégration de plein droit dans son corps ou son cadre d’emplois d’origine. Lorsque, le fonctionnaire détaché et bénéficiaire d’un CDI est licencié (quel que soit son motif) par l’organisme d’accueil, il est réintégré de plein droit dans son administration, son établissement public ou sa collectivité d’origine. À tout moment pendant la durée de son détachement, le fonctionnaire peut solliciter sa radiation des cadres et le bénéfice d’une indemnité. À noter que c’est le second cas de détachement d’office d’un fonctionnaire qui est inscrit dans le statut. Le précédent, introduit par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, modifiant l’article 30 de la loi du 13 juillet 1983, précitée, permet à une autorité territoriale de détacher un fonctionnaire suspendu qui fait l’objet de poursuites pénales.

Pour la mise en application de ces dispositions le décret du 11 juin 2020, précité (publié au Journal officiel du 13 juin 2020), précise pour chaque versant de la fonction publique, les modalités de détachement d'office des fonctionnaires sur un CDI lorsque l'activité d'une personne morale de droit public employant des fonctionnaires est transférée à une personne morale de droit privé ou à une personne morale de droit public gérant un Spic.  S’agissant des fonctionnaires territoriaux, ce décret modifie le décret du 13 janvier 1986, précité. Ces dispositions s’appliquent depuis le 14 juin 2020.

1. Création du cas de détachement d’office au sein du décret du 13 janvier 1986, relatif aux positions administratives

Le 5° de l’article 2 du décret du 13 janvier 1986, précité comprend désormais deux cas de détachement distincts :

  1. Détachement auprès d'une entreprise privée assurant des missions d'intérêt général, notamment auprès d'une entreprise titulaire d'un traité de concession, d'affermage, de gérance ou de régie intéressée d'un service public d'une collectivité publique, sous réserve de l'approbation préalable, par la collectivité ou l'établissement dont relève l'agent, du projet de contrat et de ses avenants éventuels ;
  2. Détachement d'office auprès d'une personne morale de droit privé ou d'une personne morale de droit public gérant un Spic dans les conditions prévues au I de l’article 15 de loi du 13 juillet 1983, précitée.

2. La procédure de détachement d’office : le rôle clé de l’autorité territoriale

Un nouveau chapitre (V) est intégré au décret du 13 janvier 1986, précité, il est consacré au détachement d’office prévu au b) ci-dessus (articles 15 à 15-6 du décret modifié).

Celui-ci est prononcé par l'autorité territoriale dont relève le fonctionnaire intéressé pour la durée du contrat liant la personne publique à l'organisme d'accueil (article 15).

Le nouvel article 15-1 prévoit que le fonctionnaire doit être informé par son administration, au moins trois mois avant la date de son détachement, de sa rémunération et de ses conditions d'emploi au sein de l'organisme d'accueil. En outre, au moins huit jours avant la date de détachement, l'administration doit communiquer au fonctionnaire la proposition de CDI au sein de l'organisme d'accueil. La période d'essai qui résulterait de l'application de l'article L. 1221-19 du code de travail, d'une convention ou d'un accord collectifs est réputée accomplie, ce qui signifie qu’il n’y a pas de période d’essai. A noter qu’un fonctionnaire stagiaire ne peut être détaché d’office.

S’agissant du fonctionnaire qui exerce ses fonctions dans un service dont l'activité est transférée mais dont l'emploi n'est pas inclus dans le transfert relève, si son emploi est susceptible d'être supprimé, des dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, précitée (maintien en surnombre dans la collectivité ou l’établissement durant un an, puis si aucun emploi correspondant à son grade n’est vacant, prise en charge par le centre de gestion ou le CNFPT, selon le cas et application d’une dégressivité de l’indemnisation drastique, prévue par la loi du 6 août 2019).

3. Le respect des règles déontologiques liées à la mobilité

Le nouvel article 15-2 du décret du 13 janvier 1986, précité, prévoit que détachement ne peut être prononcé qu'après que l'autorité hiérarchique dont relève le fonctionnaire s'est assurée de la compatibilité de l'activité envisagée au sein de l'organisme d'accueil avec les fonctions exercées par l'intéressé au cours des trois dernières années. En cas de doute sérieux, il devra recueilli l'avis du référent déontologue ou, le cas échéant, après avoir saisi la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) dans les conditions prévues par le décret du 30 janvier 2020, précité. Toutefois, par dérogation aux articles 18, 19 et 24 de ce décret, l'autorité hiérarchique procède à ces diligences sans qu'il soit besoin qu'une demande en ce sens lui soit adressée par le fonctionnaire intéressé.

4. Les conditions de rémunération du fonctionnaire détaché d’office

En application des dispositions de l’article 15-4 du décret du 13 janvier 1986, précité, la rémunération du fonctionnaire détaché d'office est égale à la rémunération annuelle brute la plus élevée correspondant :

1° Soit à l'intégralité de la rémunération brute perçue au titre des douze derniers mois précédant la date de début de son détachement. En sont exclus les éléments suivants :

  • Les indemnités représentatives de frais ;
  • Les indemnités liées au dépassement effectif du cycle de travail (indemnités horaires pour travaux supplémentaires, notamment) ;
  • Les primes et indemnités liées au changement de résidence, à la primo-affectation ou à la mobilité géographique ;
  • Les indemnités d'enseignement ou de jury ainsi que les autres indemnités non directement liées à l'emploi.

Sont donc compris, hormis le traitement, les autres primes et indemnités, y compris celle prévue à l’article 111 de la loi du 26 janvier 1984, précitée, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et la nouvelle bonification indiciaire.

2° Soit à la rémunération brute annuelle perçue par un salarié ayant la même ancienneté et exerçant les mêmes fonctions au sein de l'organisme d'accueil ou qu'il percevrait au titre des conventions ou accords collectifs applicables au sein de cet organisme.

5. Les conditions du renouvellement du détachement

Le nouvel article 15-3 du décret du 13 janvier 1986, précité, prévoit que le renouvellement du détachement d'office est prononcé par l'autorité territoriale dont relève le fonctionnaire pour la durée du contrat liant la personne publique à l'organisme d'accueil.

En cas de renouvellement du contrat liant la personne publique à l'organisme d'accueil, le fonctionnaire est informé du renouvellement de son détachement par l'administration au plus tard trois mois avant l'échéance de ce contrat.

En cas de nouveau contrat liant la personne publique à un autre organisme d'accueil, le fonctionnaire est informé du renouvellement de son détachement par l'administration au plus tard trois mois avant l'échéance du contrat précédent. Le nouvel organisme d'accueil est tenu d'établir un nouveau contrat reprenant les clauses substantielles du précédent contrat de travail dont bénéficiait le fonctionnaire détaché, notamment celles relatives à la rémunération.

6. Les règles relatives à la fin du détachement d’office

Le nouvel article 15-5 du décret du 13 janvier 1986, précité, prévoit que la fin du détachement du fonctionnaire s’opère selon cinq cas différents :

1° S'il est affecté, sur sa demande, dans un emploi vacant au sein d'une administration publique, sous réserve d'un délai de prévenance de l'organisme d'accueil qui ne peut être inférieur à un mois. Il s’agit de l’hypothèse où le fonctionnaire territorial s’est livré à une recherche d’emploi et a été recruté par une administration ;

2° S'il bénéficie, sur sa demande, d'un nouveau détachement au titre de l'article 2 du décret du 13 janvier 1986, précité, s'il est placé en disponibilité au titre des articles 21 (études, recherches d’intérêt général, convenances personnelles), 23 (création ou reprise d’entreprise) et 24 (raisons familiales) du même décret, ou s'il est placé en congé parental ;

3° S'il est, sur sa demande, radié des cadres. Dans ce cas, sauf s'il est à moins de deux ans de l'âge d'ouverture de ses droits à retraite, le fonctionnaire perçoit une indemnité égale à un douzième de la rémunération brute annuelle perçue par l'agent au cours de l'année civile précédant celle du dépôt de la demande de radiation des cadres multiplié par le nombre d'années échues de service effectif dans l'administration, dans la limite de vingt-quatre fois un douzième de sa rémunération brute annuelle. Cette indemnité lui est versée en une fois par son administration d'origine. Pour la détermination de cette rémunération brute annuelle, sont exclues :

  1. Les primes et indemnités qui ont le caractère de remboursement de frais ;
  2. Les majorations et indexations relatives à une affection outre-mer ;
  3. L'indemnité de résidence à l'étranger ;
  4. Les primes et indemnités liées au changement de résidence, à la primo-affectation et à la mobilité géographique ;
  5. Les indemnités d'enseignement ou de jury ainsi que les autres indemnités non directement liées à l'emploi ;

4° Si l'organisme d'accueil prononce son licenciement. Dans ce cas, il est réintégré dans son cadre d'emplois d'origine, le cas échéant en surnombre, dans les conditions de l'article 97 de la loi du 16 janvier 1984, précitée Le licenciement prononcé à l'encontre du fonctionnaire n'ouvre pas droit à des indemnités de licenciement. L'organisme d'accueil doit informer l'administration du licenciement du fonctionnaire trois mois avant la date effective de celui-ci ;

5° Si le CDI, sur lequel est détaché le fonctionnaire, est rompu à son initiative ou d'un commun accord avec l'organisme d'accueil sans que l'intéressé ne soit placé dans l'une des positions statutaires mentionnées au 2° ci-dessus. Dans ce cas, l'intéressé est réintégré dans son cadre d'emplois d'origine, le cas échéant en surnombre, dans les conditions de l'article 97 de la loi du 16 janvier 1984, précité.

Le nouvel article 15-6 du décret du 13 janvier 1986, précité, prévoit qu’au terme du contrat liant la personne publique à l'organisme d'accueil, et en l'absence de renouvellement de ce contrat ou de passation d'un nouveau contrat, le fonctionnaire opte pour :

1° Sa réintégration dans son cadre d'emplois d'origine, le cas échéant en surnombre, dans les conditions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984, précitée ;

2° Le cas échéant, son placement dans une autre position conforme à son statut ;

3° Sa radiation des cadres sur décision de son administration d'origine. Dans ce cas, le fonctionnaire perçoit, sauf s'il est à moins de deux ans de l'âge d'ouverture de ses droits à retraite, une indemnité calculée dans les conditions mentionnées au 3° de l'article 15-5 (voir ci-dessus). Cette indemnité doit lui être versée en une fois par son administration d'origine.
En l'absence de choix exprimé avant le terme du contrat, le fonctionnaire est réputé avoir opté pour sa réintégration.

Références :

-  Article 15 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires.

-  Article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

-  Décret n° 86-68 du 13 janvier 1986, relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l’intégration.

-  Décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020, relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique.

Auteur(s) :

CNFPT

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