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Dernière mise à jour : 17/11/2020

D’essence jurisprudentielle et législative, les principes déontologiques de l’action publique ont été substantiellement redéfinis consécutivement à « l’affaire Cahuzac » en 2012. C’est ainsi que la loi organique n° 2013-906 et la loi n° 2013-907 (dite loi Sapin) du 11 octobre 2013, toutes deux relatives « à la transparence de la vie publique », visent à moraliser l’action publique (personnel politique, membres du Gouvernement, élus nationaux et locaux, membres des cabinets et hauts fonctionnaires). Puis, la loi n° 2016-1691 « relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique » du 9 décembre 2016 (dite loi « Sapin 2 ») tend à améliorer la transparence des rapports entre les représentants d'intérêts et les pouvoirs publics. Cette loi crée, en particulier, « l’Agence française anticorruption » (Afa). Enfin, la loi organique n° 2017-1338 et la loi n° 2017-1339, dénommées « pour la confiance dans la vie politique », promulguées le 15 septembre 2017, suppriment la réserve parlementaire et créent une peine complémentaire obligatoire d’inéligibilité en cas de crime ou de manquements à la probité.  

S’agissant plus spécifiquement des agents publics (fonctionnaires et contractuels des trois versants de la fonction publique), c’est la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, « relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires » qui a inscrit des principes déontologiques dans le statut général. Enfin, la loi n° 2019-828 du 6 août 2019, dite « de transformation de la fonction publique » a amendé certains de ces principes et a accru le rôle de la « Haute autorité pour la transparence de la vie publique » (HATVP) au détriment de la défunte « Commission de déontologie de la fonction publique ». Après avoir énoncé les grands principes déontologiques (1), seront successivement présentés : le principe de laïcité et la déontologie (2) ; la prévention des conflits d’intérêts (3) ; les obligations déclaratives des acteurs publics (4) ; le contrôle de la gestion sans droit de regard des instruments financiers ; la mobilité public/ privé : ses règles et son contrôle (6). Enfin seront examinés les rôles et responsabilités des référents déontologues (7) et des lanceurs d’alerte (8).

1. Les grands principes déontologiques

La moralisation de la vie publique s’appuie, en grande partie, sur des principes de « vertu républicaine ».

Erigés sous forme de chartes ou dans divers textes qu’ils soient d’ordre législatif ou réglementaire, ils prônent un comportement fondé sur des valeurs déontologiques, au service de l’intérêt général.

En premier lieu, l’article 1er de la loi du 11 octobre 2013, précitée, dispose : « Les membres du Gouvernement, les personnes titulaires d'un mandat électif local ainsi que celles chargées d'une mission de service public exercent leurs fonctions avec dignité, probité et intégrité et veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d'intérêts. Les membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes exercent également leurs fonctions avec impartialité ».

C’est ainsi que l’article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires (modifié par la loi du 20 avril 2016, précitée) dispose :

« Le fonctionnaire exerce ses fonctions avec dignité, impartialité, intégrité et probité.

Dans l'exercice de ses fonctions, il est tenu à l'obligation de neutralité.

Le fonctionnaire exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. A ce titre, il s'abstient notamment de manifester, dans l'exercice de ses fonctions, ses opinions religieuses.

Le fonctionnaire traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité. (…) ».

S’agissant des élus locaux, l’article L. 1111-1-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) créé par l’article 2 de la loi n° 2015-366 du 31 mars 2015, « visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat », indique :

« Les élus locaux sont les membres des conseils élus au suffrage universel pour administrer librement les collectivités territoriales dans les conditions prévues par la loi. Ils exercent leur mandat dans le respect des principes déontologiques consacrés par la présente charte de l'élu local.

Charte de l'élu local

1. L'élu local exerce ses fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité.

2. Dans l'exercice de son mandat, l'élu local poursuit le seul intérêt général, à l'exclusion de tout intérêt qui lui soit personnel, directement ou indirectement, ou de tout autre intérêt particulier.

3. L'élu local veille à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d'intérêts. Lorsque ses intérêts personnels sont en cause dans les affaires soumises à l'organe délibérant dont il est membre, l'élu local s'engage à les faire connaître avant le débat et le vote.

4. L'élu local s'engage à ne pas utiliser les ressources et les moyens mis à sa disposition pour l'exercice de son mandat ou de ses fonctions à d'autres fins.

5. Dans l'exercice de ses fonctions, l'élu local s'abstient de prendre des mesures lui accordant un avantage personnel ou professionnel futur après la cessation de son mandat et de ses fonctions.

6. L'élu local participe avec assiduité aux réunions de l'organe délibérant et des instances au sein desquelles il a été désigné.

7. Issu du suffrage universel, l'élu local est et reste responsable de ses actes pour la durée de son mandat devant l'ensemble des citoyens de la collectivité territoriale, à qui il rend compte des actes et décisions pris dans le cadre de ses fonctions. »

De même, les règlements intérieurs du Sénat et de l’Assemblée nationale contiennent des dispositions d’ordre déontologique (articles 91 bis et suivants du règlement du Sénat : https://www.senat.fr/reglement/reglement57.html#toc215 et code de déontologie des députés : http://www.assemblee-nationale.fr/connaissance/reglement.pdf). De façon générale, les organismes qui concourent à l’action publique sont dotés d’engagements d’ordre déontologique (établissements publics, agences, autorités administratives indépendantes, …).

2. Le principe de laïcité et la déontologie

L’article 2 de la loi du 9 décembre 1905, « concernant la séparation des Églises et de l’État », dispose :

« La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte (…). »

Sur la base de cette disposition, le constituant de 1995, a précisé à l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. »

En principe donc, le principe de laïcité s’impose aux acteurs de l’action publique, il implique l’interdiction de toute manifestation des opinions religieuses durant le service. Tel est effectivement le cas s’agissant des agents publics (fonctionnaires et contractuels, voir ci-dessus, l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983, précitée. Plus délicate est la question des élus locaux et nationaux.

C’est ainsi que nombres de présidents de la République (sous la Ve, tous sauf G. Pompidou, F. Mitterrand et F. Hollande), ont accepté de se rendre à Latran, pour y recevoir des mains du pape, le titre de « chanoine » (voir : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/06/26/pourquoi-le-president-francais-devient-il-chanoine-de-latran_5321396_4355770.html). C’est ainsi également, qu’à l’occasion du décès de Jacques Chirac l’Élysée a produit un communiqué de presse par lequel il est était indiqué que « Le Président de la République présidera un service solennel en l'église Saint-Sulpice à l'intention du Président Jacques Chirac » (voir : https://www.liberation.fr/direct/element/hommage-a-chirac-lelysee-sembrouille-dans-sa-com_103267/).

D’une manière générale, en tant que représentants de l’État ou élus de collectivités territoriales, a fortiori lorsqu’ils exercent des fonctions en qualité d’agents de l’État, les élus se doivent de respecter le principe de neutralité de l’État. Cependant, ils demeurent des hommes politiques qui doivent, en tant que tels, jouir de la plus grande liberté d’opinion.  S’agissant des élus locaux l’Association des maires de France (AMF) recommande aux élus, et tout particulièrement aux maires et à leurs adjoints, « d’adopter une attitude personnelle neutre et laïque dans l’exercice de leurs fonctions » (voir : « Laïcité : le vade-mecum de l’AMF, Maires de France, hors-série, novembre 2015).

A noter que si la Cour de cassation a précisé, qu’« aucune disposition législative (…) ne permet au maire d’une commune, dans le cadre des réunions du conseil municipal, lieu des débats et de confrontations d’idées, d’interdire aux élus de manifester publiquement, notamment par le port d’un insigne, leur appartenance religieuse » (Cass. crim., 1er septembre 2010, pourvoi n° 10-80584) ; l’instruction générale du règlement de l’Assemblée nationale en dispose tout autrement. C’est ainsi que son article 9 (modifié en 2018) précise : « la tenue vestimentaire adoptée par les députés dans l’hémicycle doit rester neutre et s’apparenter à une tenue de ville. Elle ne saurait être le prétexte à la manifestation de l’expression d’une quelconque opinion : est ainsi notamment prohibé le port de tout signe religieux ostensible, d’un uniforme, de logos ou messages commerciaux ou de slogans de nature politique ». 

3. La prévention des conflits d’intérêts

L’article 2 de la loi du 11 octobre 2013, précitée, définit un conflit d’intérêts comme : « toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction. » On retrouve cette même définition applicable à l’égard des agents publics dans le titre I du statut des fonctionnaires (article 25 bis de la loi du 13 juillet 1983, créé par la loi du 20 avril 2016, modifiée).

Lorsqu'ils estiment se trouver dans une telle situation, le même article 2, précité prévoit que :

1° Les membres des collèges d'une autorité administrative indépendante (AAI) ou d'une autorité publique indépendante (API) s'abstiennent de siéger ou, le cas échéant, de délibérer. Les personnes qui exercent des compétences propres au sein de ces autorités sont suppléées suivant les règles de fonctionnement applicables à ces autorités ;

2° Sous réserve des exceptions prévues au 2e alinéa de l'article 432-12 du code pénal, les personnes titulaires de fonctions exécutives locales sont suppléées par leur délégataire, auquel elles s'abstiennent d'adresser des instructions. Cet article du code pénal relatif à la prise illégale d’intérêts prévoit que « dans les communes comptant 3 500 habitants au plus, les maires, adjoints ou conseillers municipaux délégués ou agissant en remplacement du maire peuvent chacun traiter avec la commune dont ils sont élus pour le transfert de biens mobiliers ou immobiliers ou la fourniture de services dans la limite d'un montant annuel fixé à 16 000 € » ;

3° Les personnes chargées d'une mission de service public qui ont reçu délégation de signature s'abstiennent d'en user ;

4° Les personnes chargées d'une mission de service public placées sous l'autorité d'un supérieur hiérarchique le saisissent ; ce dernier, à la suite de la saisine ou de sa propre initiative, confie, le cas échéant, la préparation ou l'élaboration de la décision à une autre personne placée sous son autorité hiérarchique.

Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application de cet article ainsi que les conditions dans lesquelles il s'applique aux membres du Gouvernement. Il s’agit du décret n° 2014-90 du 31 janvier 2014 portant application de l'article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.

S'agissant des membres des collèges des AAI ou des API, le décret, précité, prévoit que la personne intéressée ne peut prendre part à aucune réunion ni émettre aucun avis en rapport avec la délibération en cause.
S'agissant des titulaires de fonctions électives locales, le même décret distingue selon que l'intéressé est à la tête de l'exécutif local ou qu'il a reçu délégation d'attributions : dans le premier cas, la personne en cause prend un arrêté par lequel elle précise les procédures dans lesquelles elle entend s'abstenir de faire usage de ses attributions et désigne la personne qui la supplée pour le traitement de l'affaire ; dans le second cas, un arrêté du délégant détermine les questions pour lesquelles la personne intéressée doit s'abstenir d'exercer ses compétences.
S'agissant des autres personnes chargées d'une mission de service public, le décret prévoit qu'elles s'abstiennent de donner des instructions aux personnes auxquelles elles ont donné délégation pour signer tous actes, en rapport avec l'affaire les plaçant en situation de conflit d'intérêts, pour lesquels elles ont elles-mêmes reçu délégation. Les personnes placées sous l'autorité d'un supérieur hiérarchique se voient dessaisies de l'affaire si ce dernier estime nécessaire d'en confier le traitement à une autre personne placée sous leur autorité ; en ce cas, la personne dessaisie du dossier ne peut prendre part à aucune réunion ni émettre aucun avis en rapport avec l'affaire.

Un second décret en Conseil d'État détermine les modalités de tenue d'un registre accessible au public, recensant les cas dans lesquels un membre du Gouvernement estime ne pas devoir exercer ses attributions en raison d'une situation de conflit d'intérêts, y compris en Conseil des ministres. Il s’agit du décret n° 2017-1792 du 28 décembre 2017. Ce registre est publié par voie électronique, dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé (voir : https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/registre-de-prevention-des-conflits-d-interets/#_).

S’agissant des agents publics (fonctionnaires et contractuels), l’article 25 bis de la loi du 13 juillet 1983, précité dispose en premier lieu qu’ils doivent veiller « à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d'intérêts dans lesquelles il[s] se trouve[nt] ou pourrai[en]t se trouver ». A cette fin, le fonctionnaire qui estime se trouver dans une situation de conflit d'intérêts :

1° Lorsqu'il est placé dans une position hiérarchique, saisit son supérieur hiérarchique ; ce dernier, à la suite de la saisine ou de sa propre initiative, confie, le cas échéant, le traitement du dossier ou l'élaboration de la décision à une autre personne ;

2° Lorsqu'il a reçu une délégation de signature, s'abstient d'en user ;

3° Lorsqu'il appartient à une instance collégiale, s'abstient d'y siéger ou, le cas échéant, de délibérer ;

4° Lorsqu'il exerce des fonctions juridictionnelles, est suppléé selon les règles propres à sa juridiction ;

5° Lorsqu'il exerce des compétences qui lui ont été dévolues en propre, est suppléé par tout délégataire, auquel il s'abstient d'adresser des instructions.

La HATVP a pour mission a pour mission d’apporter une expertise aux déclarants et aux institutions publiques en matière de conflits d’intérêts. On pourrait penser que seuls les emplois d’autorité sont exposés au risque de conflit d’intérêts (c’est ainsi, par exemple, qu’un conseiller spécial de la ministre de la Justice, Christiane Taubira, a dû démissionner car il était, dans le même temps avocat à la Cour de cassation et au Conseil d’État sur avis de la HATVP (voir : https://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/06/16/01016-20140616ARTFIG00360-le-conseiller-special-de-christiane-taubira-somme-de-demissionner.php).

Mais un fonctionnaire territorial de catégorie B ou C peut également se trouver dans une telle situation. Tel serait le cas par exemple, d’un agent communal en charge des subventions versées aux associations et qui serait, par ailleurs, président ou trésorier d’une association ainsi subventionnée.

4. Les obligations déclaratives des acteurs publics

Les obligations déclaratives applicables aux acteurs publics sont de deux ordres : la déclaration d’intérêts (a), d’une part ; et la déclaration de patrimoine (b), d’autre part.

4.1 La déclaration d’intérêts

La déclaration d’intérêts concerne plus de 15 000 responsables publics, qu’ils soient élus ou agents publics. La déclaration s’effectue auprès de la HATVP. La liste complète des acteurs publics soumis à cette déclaration figure sur le site de la Haute autorité (voir : https://www.hatvp.fr/wordpress/wp-content/uploads/2020/02/Tableau-Obligations-declaratives-RP_fev2020.pdf).

Parmi ceux-ci figurent :

  • Les membres du Gouvernement ;

  • Les députés et sénateurs ;

  • Les membres des cabinets ministériels ;

  • Les personnes occupant des emplois à la décision du Gouvernement nommés en Conseil des ministres (préfets, recteurs, …)

  • Les présidents de conseil régional ou départemental et leurs directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinets et les conseillers régionaux et départementaux titulaires d’une délégation de signature ou de fonction ;

  • Les maires de communes de plus de 20 000 habitants et leurs directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinets et les adjoints aux maires de communes de plus de 100 000 habitants titulaires d’une délégation de signature ou de fonction ;

  • les présidents d’établissements publics de coopération intercommunale  EPCI) à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des recettes de fonctionnement dépasse cinq millions d’euros, les présidents d’EPCI sans fiscalité propre dont le montant des recettes de fonctionnement dépasse cinq millions d’euros et les vice-présidents des EPCI à fiscalité propre dont la population excède 100 000 habitants lorsqu’ils sont titulaires d’une délégation de signature ou de fonction ;

  • Les directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinet des présidents d’établissements publics d’EPCI à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des recettes de fonctionnement dépasse cinq millions d’euros et des présidents d’EPCI sans fiscalité propre dont le montant des recettes de fonctionnement dépasse cinq millions d’euros.

Les déclarations d’intérêts des membres du Gouvernement, des élus nationaux et locaux font l’objet d’une publication sur le site de la HATVP.

S’agissant des hauts fonctionnaires (des trois versants de la fonction publique) « dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient », ils doivent établir une déclaration d’intérêts à leur autorité de nomination puis à leur autorité hiérarchique qui peut, en cas de doute, saisir la HATVP. Les emplois concernés sont listés dans le décret n° 2016-1967 du 28 décembre 2016 et précisés, le cas échéant, par des arrêtés ministériels. Dans la fonction publique territoriale sont, notamment concernés les emplois de :

-

  • Directeur général des services (DGS) et directeur général adjoint (DGA) des régions et des départements ;

  • DGS, DGA, directeur général des services techniques (DGST) des communes et des EPCI à fiscalité propre de plus de 40 000 habitants ;

  • DGS, DGA des EPCI assimilés à une commune de plus de 40 000 habitants ; …

Enfin, des déclarations spécifiques sont prévues pour les candidats à l’élection présidentielle (art. 3 de l’ordonnance n° 1962-1292 du 6 novembre 1962), certains militaires (art. L. 4122-6 du code de la défense), les magistrats (art. 7-2 de l’ordonnance n° 1958-1270 du 22 décembre 1958) et les juges des tribunaux de commerce (art. L. 722-21 du code de commerce).

Le contenu de la déclaration d’intérêts

La déclaration d’intérêts doit être exacte, exhaustive et sincère. La déclaration d’intérêts recense les liens d’intérêts provenant, des participations financières détenues ou des participations aux organes dirigeants d’organismes publics ou privés, des activités bénévoles, des activités professionnelles du conjoint du déclarant. L’article 4-III de la loi du 11 octobre 2013, précitée d’une part ; et l’article 7 du décret du 28 décembre 2016, d’autre part, fixent la liste des pièces à produire par les différents acteurs publics concernés.

Le rôle de la HATVP

Les personnes qui sont dans l’obligation d’adresser une déclaration d’intérêts à la Haute autorité doivent le faire au début de leur mandat ou de leurs fonctions. La HATVP exerce une veille et un contrôle ciblé des déclarations d’intérêts afin de détecter les situations dans lesquelles des intérêts publics ou privés peuvent interférer avec l’exercice d’un mandat ou d’une fonction. Lorsque l’examen d’une déclaration conduit à la détection d’une situation de conflit d’intérêts, la Haute autorité dispose de plusieurs leviers d’action lui permettant d’y mettre fin.

Elle peut en premier lieu recommander, dans le cadre d’un dialogue avec le déclarant, des solutions adaptées pour prévenir ou faire cesser un conflit d’intérêts. Il peut s’agir, par exemple, de rendre public l’intérêt en cause, de ne pas prendre part aux délibérations dans laquelle la personne concernée a un intérêt ou, dans certains cas, d’abandonner un intérêt.

Si la situation perdure, la Haute autorité peut adopter des mesures contraignantes prenant la forme d’un pouvoir d’injonction. Elle peut ainsi ordonner à toute personne qui entre dans son champ de compétence (sauf le Premier ministre et les parlementaires) de faire cesser un conflit d’intérêts. Cette injonction peut être rendue publique et son non-respect est une infraction pénale punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende. Le fait pour une personne de ne pas déposer une déclaration d’intérêts ou d’omettre de déclarer une partie importante de ses intérêts est puni d’une peine de 3 ans de prison et de 45 000 €d’amende. Le cas échéant, cela peut entraîner l’interdiction des droits civiques pour une durée maximale de 10 ans ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique, laquelle peut être définitive.

La procédure de déclaration d’intérêts au sein de la fonction publique territoriale

Dans la fonction publique territoriale, « l’autorité de nomination » est l’autorité territoriale de la collectivité ou de l’établissement. La déclaration d’intérêts doit être établie préalablement à la nomination et remise par l’agent à l’autorité territoriale ou à l'autorité hiérarchique, depuis le 1er février 2020 :

  • Soit sous double pli cacheté avec mention du caractère confidentiel ;

  • Soit par voie dématérialisée de manière sécurisée (article 8 décret du 28 décembre 2016, précité).

L’autorité territoriale en accuse réception, en prend connaissance et la transmet dans les mêmes formes à l’autorité hiérarchique de l’agent, qui en accuse réception à son tour (article 8 du décret du 28 décembre 2016, précité). Si l’emploi qui a vocation à être pourvu est celui de DGS, l’autorité territoriale est également l’autorité hiérarchique. S'il s'agit d’une nomination dans un emploi de DGA ou de DGST, l'autorité hiérarchique est le DGS.

Les éventuelles déclarations complémentaires sont transmises dans les mêmes conditions et les mêmes formes à l’autorité hiérarchique.

Si l’autorité territoriale constate que l’intéressé se trouve dans une situation de conflit d’intérêts, elle prend toutes les mesures nécessaires pour faire cesser cette situation ou enjoint au fonctionnaire d’y mettre fin, dans un délai qu’elle détermine. Si l’autorité ne s’estime pas en mesure d’apprécier l’existence d’un éventuel conflit d’intérêts, elle transmet la déclaration à la HATVP. Celle-ci rend un avis dans un délai de deux mois suivant la réception de la déclaration :

- si elle considère qu’il y a situation de conflit d’intérêts, elle adresse une recommandation à l’autorité hiérarchique. Cette dernière doit prendre toutes mesures visant à y mettre fin ou enjoindre à l’intéressé de mettre fin à cette situation dans un délai qu’elle détermine ;

- dans le cas contraire, elle informe l’autorité hiérarchique et l’intéressé que la situation n’appelle pas d’observation.

4.2 La déclaration de patrimoine

La déclaration de patrimoine concerne, à l’instar de la déclaration d’intérêts, plus de 15 000 responsables publics, qu’ils soient élus ou agents publics. La déclaration s’effectue auprès de la HATVP. La liste complète des acteurs publics soumis à cette déclaration figure sur le site de la Haute autorité (voir : https://www.hatvp.fr/wordpress/wp-content/uploads/2020/02/Tableau-Obligations-declaratives-RP_fev2020.pdf). Hormis les fonctionnaires, la liste des personnes astreintes a l’obligation de déclarer leur patrimoine est la même que celle présentée ci-dessus [voir : a) ]La déclaration d’intérêts ») : ministres, élus locaux et nationaux, membres de cabinets, candidats à l’élection présidentielles, …. S’agissant des fonctionnaires la liste de ceux qui sont astreints à déclarer leur patrimoine est plus resserrée. Elle est fixée par les dispositions du décret n° 2016-1968 du 28 décembre 2016, relatif à l'obligation de transmission d'une déclaration de situation patrimoniale prévue à l'article 25 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. S’agissant de la fonction publique territoriale, il s’agit, notamment, des emplois de :

  • DGS des régions, départements et des communes de plus de 150 000 habitants ;

DGS des EPCI à fiscalité propre de plus de 150 000 habitants et des EPCI assimilés à des communes de plus de 150 000 habitants ; …

Le contenu de la déclaration de patrimoine

La déclaration de patrimoine comprend d’une part l’actif, soit les biens immobiliers, les actions ou les comptes bancaires ; et d’autre part, les emprunts et les dettes formant le passif. Elle est adressée à la Haute autorité à deux reprises :

 - lorsque la personne concernée débute son mandat ou ses fonctions ;

- et à la fin de celles-ci.

En outre, les déclarants sont tenus de déposer une nouvelle déclaration si la composition de leur patrimoine est affectée de manière importante, par une succession ou une donation, notamment.

Le rôle de la HATVP

Le contrôle effectué par la Haute autorité répond à un triple objectif :

  • S’assurer de la cohérence des éléments déclarés ;

  • Rechercher des omissions importantes ou variations inexpliquées du patrimoine

  • Prévenir tout enrichissement obtenu de manière illicite.

Pour assurer efficacement sa mission de contrôle du patrimoine, la HATVP bénéficie de l’appui de la Direction général des finances publiques (DGFiP). Elle peut la solliciter pour obtenir des informations sur les éléments déclarés ou pour obtenir des documents précis. L’administration fiscale étant déliée du secret à son égard au titre des vérifications et contrôles qu’elle met en œuvre, la Haute autorité peut également lui demander communication d’autres éléments en sa possession. Par exemple, elle peut lui demander communication de statuts de sociétés, d’éléments cadastraux ou lui demander d’évaluer des parts sociales ou un bien immobilier. Lorsque la Haute autorité l’estime nécessaire, elle peut également demander à l’administration fiscale de mettre en œuvre le droit de communication qu’elle détient en application du livre des procédures fiscales « en vue de recueillir toutes informations utiles à l’accomplissement de sa mission de contrôle ». Ces demandes peuvent concerner, par exemple, des soldes de comptes bancaires, des procédures judiciaires en cours ou des communications d’actes authentiques ou des bilans de sociétés. Elle peut enfin demander à l’administration fiscale de mettre en œuvre les procédures d’assistance administrative internationale en vue de recueillir à l’étranger des informations concernant certains éléments de patrimoine. Le résultat de ces procédures, qui n’ont pas de finalité fiscale, est toutefois conditionné par les conventions bilatérales applicables et à l’accord des autorités du pays concerné.

En complément, la Haute autorité engage un dialogue avec le déclarant afin de recueillir toutes les informations nécessaires à l’examen de sa déclaration. Cette procédure est essentielle : elle permet aux déclarants de faire valoir les observations qu’ils estiment utiles et d’assurer la pleine information de la HATVP.

À l’issue du contrôle, le collège de la Haute autorité peut :

  • Clore l’examen de la déclaration ;

  • Formuler une appréciation, autrement dit une observation, sur une déclaration de patrimoine quand celle-ci n’est pas strictement exacte et/ou exhaustive ;

  • Transmettre, dans les cas les plus graves, le dossier au parquet compétent qui a la possibilité de déclencher une procédure pénale.

Le fait pour une personne de ne pas déposer une déclaration de patrimoine, d’omettre de déclarer une partie importante de celui-ci ou d’en fournir une évaluation mensongère est puni d’une peine de 3 ans de prison et de 45 000 € d’amende. Le cas échéant, cela peut entraîner l’interdiction des droits civiques pour une durée maximale de 10 ans, ainsi que l’interdiction d’exercer une fonction publique, laquelle peut être définitive.

5. Le contrôle de la gestion sans droit de regard des instruments financiers

Certains éléments du patrimoine, tels que la détention d’instruments financiers, peuvent influencer le sens de la décision prise par son titulaire au titre de ses fonctions publiques. En outre, la gestion de ces titres est susceptible d’exposer leur titulaire à des risques pénaux tels que le délit d’initié prévu à l’article L. 465-1 du code monétaire et financier. Afin de prévenir ce type de risques, l’article 8 de loi du 11 octobre 2013, précitée, prévoit que les membres du Gouvernement, les présidents et membres des autorités administratives ou publiques indépendantes (AAI ou API) intervenant dans un secteur économique ainsi que certains fonctionnaires sont tenus de gérer leurs instruments financiers dans des conditions excluant tout droit de regard de leur part pendant la durée de leurs fonctions. La liste des personnes soumises à cette obligation figurent sur le site de la HATVP ( voir : https://www.hatvp.fr/wordpress/wp-content/uploads/2020/02/Tableau-Obligations-declaratives-RP_fev2020.pdf) Ces personnes justifient des mesures prises auprès de la HATVP

En dehors des cas où ils détiennent des instruments financiers dont la gestion est collective (Sicav, par exemple), les ministres, présidents et membres de ces autorités doivent conclure des mandats de gestion ne permettant aucun droit de regard sur les titres qu’ils détiennent. Lorsque les instruments financiers détenus sont sans lien avec le secteur d’activité qu’ils régulent, les membres des AAI et API peuvent également s’engager à les conserver en l’état. 

S’agissant spécifiquement des agents publics, l’article 25 quater de la loi du 13 juillet 1983, créé par la loi du 20 avril 2016, précitée, dispose :

« I.Le fonctionnaire exerçant des responsabilités en matière économique ou financière et dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient est tenu de prendre, dans un délai de deux mois suivant cette nomination, toutes dispositions pour que ses instruments financiers soient gérés, pendant la durée de ses fonctions, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part.

Le fonctionnaire justifie des mesures prises auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

Les documents produits en application du présent I ne sont ni versés au dossier du fonctionnaire, ni communicables aux tiers.

II.-Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat, après avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. »

Il s’agit du décret n° 2017-547 du 13 avril 2017, relatif à la gestion des instruments financiers détenus par les fonctionnaires ou les agents occupant certains emplois civils. Ce texte fixe la liste des emplois concernés dans l'administration centrale et les établissements publics administratifs de l'État et la fonction publique hospitalière ainsi que dans les autorités administratives indépendantes et autorités publiques indépendantes (AAI et API). En revanche, aucun emploi relevant de la fonction publique territoriale n’est concerné par ces dispositions.

6. La mobilité public/ privé : ses règles et son contrôle

La HATVP contrôle, depuis sa création, la reconversion professionnelle des anciens membres du Gouvernement, présidents d’exécutifs locaux et membres d’une AAI ou d’une API.  Ainsi, l’article 23 de la loi du 11 octobre précité, dispose que les titulaires d'une fonction de président de conseil régional, de président de l'Assemblée de Corse, de président du conseil exécutif de Corse, de président de l'assemblée de Guyane, de président de l'assemblée de Martinique, de président du conseil exécutif de Martinique, de président d'une assemblée territoriale d'outre-mer, de président de conseil départemental, de président du conseil de la métropole de Lyon, de président élu d'un exécutif d'une collectivité d'outre-mer, de maire d'une commune de plus de 20 000 habitants ou de président élu d'un EPCI à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions €, ainsi que les présidents des autres EPCI, dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions €, sont soumis au contrôle de la Haute autorité.

Celle-ci se prononce sur la compatibilité de l'exercice d'une activité libérale ou d'une activité rémunérée au sein d'une entreprise ou au sein d'un établissement public ou d'un groupement d'intérêt public dont l'activité a un caractère industriel et commercial avec les fonctions, précitées, exercées au cours des trois années précédant le début de cette activité. La Haute autorité est chargée de vérifier si l’activité envisagée pose des difficultés de nature pénale ou déontologique. Lorsqu’elle identifie de telles difficultés, elle peut rendre un avis d’incompatibilité, qui empêche la personne d’exercer l’activité envisagée, ou de compatibilité avec réserves, dans lequel elle impose des mesures de précaution de nature à prévenir le risque pénal et déontologique.

La loi prévoit que la HATVP peut rendre publics les avis qu’elle accorde après avoir recueilli les observations de la personne concernée et avoir retiré les mentions qui portent atteinte à un secret protégé par la loi.

La nature du contrôle de la Haute autorité

Lorsqu’elle est saisie par un ancien responsable public (voir ci-dessus), la Haute autorité se livre à un double contrôle. 

En premier lieu, elle recherche si l’activité envisagée n’expose pas la personne concernée à un risque pénal. En effet, l’article 432-13 du code pénal interdit à un ancien responsable public de travailler, au sens large, pour une entreprise qui était soumise à son pouvoir de surveillance ou de contrôle lorsqu’il exerçait des fonctions publiques, avec laquelle il a conclu des contrats ou à l’égard de laquelle il a pris ou proposé des décisions. Si la HATVP considère que l’activité envisagée conduirait nécessairement l’ancien responsable public à commettre ce délit, elle peut prononcer un avis d’incompatibilité et l’activité ne peut pas être exercée. S’il existe un risque pénal mais que ce risque peut être évité par la mise en œuvre de certaines précautions, la Haute autorité rend un avis de compatibilité en formulant les réserves qui s’imposent. Par exemple, lorsqu’elle est saisie de la création d’une société de conseil, elle va demander de ne pas prendre pour clientes des sociétés avec lesquelles l’intéressé a conclu des contrats lorsqu’il était en fonctions ou à l’égard desquelles il a pris des décisions.

Par ailleurs, sur le plan déontologique, la Haute autorité s’assure d’abord que l’activité envisagée ne porte pas atteinte à la dignité, à la probité et à l’intégrité des fonctions antérieures. Ensuite, le contrôle porte sur l’obligation de prévention des conflits d’intérêts : le fait d’exercer cette nouvelle activité ne doit pas révéler l’existence d’une situation de conflit d’intérêts lorsque la personne concernée exerçait ses activités publiques. Un tel risque est plus fréquent lorsque la nouvelle activité est exercée dans le même secteur économique. A ce titre, un responsable public ne peut pas se servir de ses fonctions pour préparer sa reconversion professionnelle. Enfin, la HATVP vérifie que l’activité envisagée ne remet pas en cause le fonctionnement indépendant, impartial et objectif de l’institution publique dans laquelle l’intéressé a exercé ses fonctions. En fonction des risques identifiés, la Haute autorité peut déclarer l’activité incompatible ou formuler des réserves.

La loi du 6 août 2019, dite « de transformation de la fonction publique » a, en outre, confié à la HATVP de nouvelles missions en matière de contrôle de la déontologie de certains agents publics.

En premier lieu, depuis le 1er février 2020, la Haute autorité s’est substituée à la Commission de la déontologie de la fonction publique, supprimée par la loi précitée.

Contrôle interne des administrations et saisine de la HATVP à titre subsidiaire

Le contrôle déontologique de la très grande majorité des agents publics relève de l’administration elle-même. Ce contrôle est internalisé, dans la mesure où il est effectué par le supérieur hiérarchique de l’agent concerné, qui peut consulter le référent déontologue en cas de difficulté sur la réponse à apporter à la situation. Le supérieur hiérarchique prend lui-même la décision quant à la faisabilité du projet de l’agent public (reconversion professionnelle ou cumul d’activités) ou à la nomination d’un agent public, issu du secteur privé, dans un emploi de la fonction publique.

Le contrôle déontologique principal, internalisé, peut nécessiter l’intervention de la Haute autorité, selon un principe de subsidiarité : si l’autorité hiérarchique a un doute sérieux sur le projet en cause, même après avoir saisi le référent déontologue, elle peut saisir la HATVP. Cette saisine est donc facultative et subsidiaire : elle ne peut porter que sur la reconversion professionnelle des agents publics, leurs projets de création ou de reprise d’entreprise, et les nominations dans certains emplois énumérés par le décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020, relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique. Le site de la HATVP publie deux schémas récapitulatifs des procédures applicables :

Cas de saisine obligatoire de la HATVP

La Haute autorité doit obligatoirement être saisie dans les cas suivants :

  • Création ou reprise d’une entreprise (cumul d’activités) :

Par un agent « occupant un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient » (emplois définis par le décret du 30 janvier 2020, précité). Il s’agit des agents publics astreints à l’obligation de transmission d’une déclaration d’intérêts (prévue par les dispositions de l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983, précitée). Dans la fonction publique territoriale, sont donc, notamment, concernés, les DGS et les DGA des régions et des départements, ainsi que les DGS, DGA et DGST des communes et EPCI classés dans la catégorie démographique supérieure à 40 000 habitants.

  • Reconversion professionnelle dans le secteur privé :

- Par un agent « occupant un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient » (emplois définis par le décret du 30 janvier 2020, précité). Il s’agit des agents publics astreints à l’obligation de transmission d’une déclaration d’intérêts (prévue par les dispositions de l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983, précitée). Dans la fonction publique territoriale, sont donc, notamment, concernés, les DGS et les DGA des régions et des départements, ainsi que les DGS, DGA et DGST des communes et EPCI classés dans la catégorie démographique supérieure à 40 000 habitants. *

Sont également soumis à ces deux obligations de saisine : les agents occupant les emplois de directeurs, directeurs adjoints et chefs de cabinet soumis à l'obligation de transmission d'une déclaration de situation patrimoniale et d'une déclaration d'intérêts. Dans la fonction publique territoriale, il s’agit, notamment, des proches collaborateurs des présidents de conseil régional, des président de conseil départemental, de maires d'une commune de plus de 20 000 habitants ou de président élu d'un EPCI à fiscalité propre dont la population excède 20 000 habitants ou dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions € ainsi que les présidents des autres EPCI dont le montant des recettes totales de fonctionnement figurant au dernier compte administratif est supérieur à 5 millions € (8° et 2° de l’article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique).

  • Nomination d’une personne ayant exercé une activité privée lucrative au cours des trois dernières années à l’une des fonctions publiques suivantes :

- collaborateur du président de la République ;

- membre d’un cabinet ministériel ;

-directeur d’administration centrale ou d’un établissement public de l’État nommé en conseil des ministres ;

- directeur général des services d’une région, un département, une commune ou un EPCI de plus de 40 000 habitants ;

-directeur d’un établissement public hospitalier doté d’un budget de plus de 200 millions €.

Pour une vision synthétique voir le tableau récapitulatif des agents et responsables publics soumis à un contrôle déontologique dans le cadre d’une mobilité public/privé sur le site de la HATVP : https://www.hatvp.fr/wordpress/wp-content/uploads/2020/01/tableau-recapitulatif_controle-deontologique_agents-et-responsables-publics.pdf

Ce récent dispositif de contrôle des passages du public vers le privé sera-t-il à même d’endiguer la porosité endémique entre milieu des affaires et haute fonction publique ? A titre d’illustration une enquête approfondie de la revue « Alternatives économiques » (« Conflits d’intérêts : ces hauts fonctionnaire qui préfèrent le privé », par Agnès Rousseaux et Claire Alt, publié juillet 2017 : https://www.alternatives-economiques.fr/hauts-fonctionnaires-preferent-prive/00079448) révélait que, « sur les 333 inspecteurs [généraux des finances] (…) recensés, 55 % travaillent ou ont travaillé dans le secteur privé et 34 % (soit 115 d’entre eux) ont exercé dans le secteur bancaire à un moment de leur carrière. Près de la moitié de ceux qui sont passés par le secteur privé reviennent dans le secteur public. »

7. Le rôle du référent déontologue

La loi du 20 avril 2016, précitée, a créé, au profit des agents publics, un « droit de consulter un référent déontologue » (article 28 bis de la loi du 13 juillet 1983, précitée). En découle l’obligation légale pour les administrations de l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics et les établissements de santé de se doter d’un référent déontologue, qui permet aux agents des trois versants de la fonction publique d’exercer ce nouveau droit. L’idée d’un référent déontologue au cœur des services, conseiller des agents publics, n’est pas une spécificité française. C’est ainsi que les Pays-Bas et le Royaume-Uni, notamment, disposent d’une institution équivalente. En France, le référent déontologue est chargé d'apporter à tout agent public qui le demande des conseils utiles au respect des principes déontologiques de la fonction publique.

Pour rappel, ces principes sont notamment les suivants : la dignité, l’impartialité, l’intégrité et la probité ; la neutralité ; la laïcité ; le respect de la liberté de conscience et de la dignité des usagers ; la cessation ou la prévention des situations de conflit d'intérêts lorsque l'agent se trouve ou pourrait se trouver dans une telle situation ; la déclaration exhaustive, exacte et sincère de sa situation patrimoniale lorsque l'agent occupe un emploi soumis à une telle déclaration. Principes auxquels s’ajoutent : le non cumul d'emploi, sauf s'il s'agit d'une activité autorisée ; l’obéissance hiérarchique ; la satisfaction aux demandes d'information du public.

Le décret n° 2017-519 du 10 avril 2017 relatif au référent déontologue dans la fonction publique, s’il apporte quelques précisions, laisse aux administrations une très grande latitude dans la mise en place de leur référent déontologue, qui peut prendre une forme individuelle ou collégiale, être une fonction à temps plein ou cumulée avec d’autres, par exemple, avec celle de référent laïcité et/ ou de référent alerte éthique.

Face à ce constat, la HATVP note que : « Cette liberté est une chance, car elle permet aux collectivités publiques d’assurer une adaptation des obligations générales à leurs spécificités. Elle autorise aussi une phase d’expérimentation afin d’aller vers le dispositif le plus efficace en fonction des problématiques propres. Cette souplesse n’est cependant pas sans inconvénients. Le premier risque est de voir apparaître des pratiques très différentes entre les administrations et les différentes collectivités territoriales : certains agents n’auraient alors pas accès à un service de même qualité, ou bien les interprétations des règles générales pourraient s’avérer discordantes. Le second risque est que, sans travail de précision des missions du déontologue par chaque administration, sans l’attribution de moyens et sans un soutien hiérarchique, cette nouvelle figure de la fonction publique reste une coquille vide ». C’est pourquoi la Haute autorité propose une série de fiches méthodologiques permettant l’installation et le fonctionnement conforme à la législation et à la réglementation du référent déontologue(https://www.hatvp.fr/wordpress/wp-content/uploads/2020/05/HATVP_guidedeontoWEB.pdf).

A noter que les collectivités et les établissements public locaux peuvent instituer un référent déontologue au service des élus locaux.

8. Les lanceurs d’alerte

Un agent public (fonctionnaire ou contractuel) qui a personnellement connaissance de certains faits ou actes répréhensibles peut effectuer un signalement en tant que lanceur d’alerte. Le lanceur d'alerte doit en principe signaler le fait répréhensible en interne au sein de son administration. En l'absence de suites données au signalement ou, en cas de danger grave et imminent ou en présence d'un risque de dommages irréversibles, l'agent peut signaler le fait à une autorité externe à l'administration. Les faits, informations ou documents, couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre un avocat et son client ne peuvent pas faire l'objet d'une alerte.

Nature des faits ou actes concernés

L'acte ou le fait visé doit concerner l'organisme qui l'emploie et constituer :

- un crime ou un délit ;

- ou une menace ou un préjudice grave pour l'intérêt général (par exemple, en matière de santé publique, d'environnement, de sécurité des biens et des personnes, etc.) ;

- ou une violation grave et manifeste d'un engagement international ratifié ou approuvé par la France, d'une loi ou d'un décret.

La procédure normale de signalement

L'agent doit signaler le fait ou l'acte à son supérieur hiérarchique, direct ou indirect ou à un référent alerte désigné par son employeur. Si le destinataire de l'alerte ne donne aucune suite au signalement dans un délai raisonnable, l'agent peut porter les faits à la connaissance :

- du procureur de la République ;

-de l'autorité administrative compétente (Haute autorité pour la transparence de la vie publique, Agence française anticorruption, etc.) ;

- ou aux ordres professionnels.

Si aucun de ces destinataires ne donne suite au signalement dans les 3 mois, l'agent peut rendre l'information publique par le biais des médias, d'associations, d'organisations non gouvernementales ou de syndicats.

Certaines administrations sont tenues d'établir une procédure de recueil des signalements :

- les administrations de l’État,

- les organismes publics d'au moins 50 agents ;

- les communes de plus de 10 000 habitants ;

- les départements et les régions et leurs établissements publics ;

- les EPCI à fiscalité propre regroupant au moins une commune de plus de 10 000 habitants ;

- les autorités publiques indépendantes d'au moins 50 agents et les autorités administratives indépendantes.

La procédure précise notamment les conditions dans lesquelles l'agent :

- adresse son signalement ;

- fournit les faits, informations ou documents de nature à étayer son signalement lorsqu'il dispose de tels éléments.

Elle précise également les dispositions prises par l'administration pour :

- informer l'agent de la réception de son signalement, du délai nécessaire à l'examen de sa recevabilité et des conditions dans lesquelles il est informé des suites données ;

- garantir la confidentialité de l'auteur du signalement, des faits en cause et des personnes visées ;

- détruire les éléments du dossier de signalement portant sur l'identité de l'auteur et des personnes visées lorsqu'aucune suite n'est donnée.

L'administration fait connaître la procédure de recueil des signalements aux agents par tout moyen (notification, affichage, publication, ...).

L’intervention éventuelle du Défenseur des droits

L'agent peut aussi choisir d'adresser son signalement au Défenseur des droits afin d'être orienté vers l'organisme compétent. L'agent doit impérativement adresser sa saisine au Défenseur des droits par écrit, sous double enveloppe :

  • L’enveloppe intérieure doit contenir tous les éléments d'information qui motivent la saisine, être fermée et comporter la seule mention suivante : » Signalement d'une alerte selon la loi du 9 décembre 2016 effectuée le (date de l'envoi) » ;

  • L’enveloppe extérieure doit contenir l’enveloppe intérieure et comporter l'adresse du Défenseur des droits.

Le respect de ces règles d'envoi est impératif afin de garantir la confidentialité des informations transmises. Un accusé de réception est adressé à l'auteur de l'envoi comportant un numéro identifiant qui sera ensuite utilisé pour les échanges avec le Défenseur des droits. Pour protéger la confidentialité des échanges, tous les courriers adressés ensuite au Défenseur des droits devront suivre la même procédure de double enveloppe.

La procédure spécifique en cas de danger grave et imminent

En cas de danger grave et imminent ou en présence d'un risque de dommages irréversibles, le signalement peut être porté directement à la connaissance :

- du procureur de la République ;

- de l'autorité administrative compétente (Haute autorité pour la transparence de la vie publique, Agence française anticorruption, etc.) ;

- ou aux ordres professionnels.

Il peut être rendu public.

La protection des lanceurs d’alerte

Le lanceur d'alerte est protégé par la loi contre toute sanction ou discrimination. Toutefois, il doit veiller, à toutes les étapes de la procédure de signalement, à garantir la confidentialité de son identité, celle des personnes mises en cause et des faits à l'origine de l'alerte. À défaut, sa responsabilité pénale peut être engagée. Les situations de danger grave et imminent ou de risque de dommages irréversibles doivent être appréhendées avec discernement. C'est le juge qui apprécie si les faits signalés constituent une situation d'urgence. L'agent qui agit de mauvaise foi ou avec l'intention de nuire ou en ayant connaissance de l'inexactitude au moins partielle des faits en cause peut faire l'objet :

- d'une sanction disciplinaire ;

- et d'une peine d'emprisonnement de 5 ans maximum et d'une amende de 45 000 € maximum.

L’ensemble de ces dispositions est fixé par :

  • L’article 6 ter A de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

  • Les articles 6 à 16 de la loi i n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ;

  • Le décret n° 2017-564 du 19 avril 2017 relatif aux procédures de recueil des signalements émis par les lanceurs d'alerte ;

  • La circulaire du 19 juillet 2018 relative à la procédure de signalement des alertes émises par les agents publics et aux garanties et protections qui leur sont accordées.

A noter qu’il existe une autre procédure distincte prévue par l’article 40 du code de procédure pénale qui fait obligation à toute autorité constituée, officier public ou fonctionnaire, qui acquiert, dans l’exercice de ses fonctions, la connaissance d’un crime ou d’un délit d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. Il importe de préciser, d’une part que les prescriptions de l’article 40 du code de procédure pénale ne fixent aucune condition quant aux modalités de leur application, et d’autre part que la Cour de Cassation a eu l’occasion de préciser que l’exécution tardive de cette obligation n’est pas sanctionnée par la nullité (Cass. crim, 20 septembre 2000, pourvoi n° 00-84.328. Enfin, si tout agent public doit saisir le procureur de la République dans les conditions de l’article 40 parce qu’il estime disposer ainsi d’éléments suffisants et probants, il a néanmoins le devoir de veiller à ne pas enfreindre l’obligation de discrétion professionnelle à laquelle il est également soumis.

 

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