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3 == __**1. Définition de l'accueil**__ ==
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5 Le Dictionnaire historique de la langue française définit le terme accueillir de la façon suivante : « réunir », « associer », « entrer au service de quelqu'un » au XVIIème siècle. Ne subsiste essentiellement que « recevoir favorablement ».
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7 L'accueil est essentiel en bibliothèque : plus largement, il s'agit d'un enjeu de service public. Le référentiel Marianne, qui succède à la Charte Marianne de 2005, comporte ainsi dix-neuf engagements destinés à améliorer la qualité de l'accueil et du service rendu aux usagers. Ces engagements s'organisent autour de cinq grands principes : des horaires adaptés, un accueil courtois, des informations claires, des délais garantis et une écoute permanente. La mise en œuvre de ce référentiel concerne tous les services publics : services de l’État, collectivités locales, organismes sociaux et établissements hospitaliers.
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9 En bibliothèque, les bibliothèques municipales de Béziers et la bibliothèque universitaire d'Albi ont par exemple obtenu le label Marianne en 2013 et 2014.
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11 On distingue généralement trois dimensions de l'accueil dans les services publics :
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13 * l'accueil implicite : il s'agit de tout ce qui est non-dit, de tout de qui appartient à l'environnement physique : éclairage, mobilier, signalétique, configuration de l'espace…
14 * l'accueil humain : l'enjeu ici est de maintenir une relation de qualité quelle que soit la demande et la personne (l'usager doit alors être vu comme un citoyen, un consommateur et un contribuable).
15 * L'accueil technique : cette dimension de l'accueil concerne la spécificité du service : documents, procédures.
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17 Ces trois dimensions sont très imbriquées : la qualité de l'accueil ne peut dépendre que de l'une ou de l'autre.
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19 == __**2. Le rôle de l'accueil en bibliothèques**__ ==
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21 En bibliothèque, sauf exception, tous les agents font de l'accueil : il s'agit, comme dans tout service public ouvert au public, d'une mission et d'une activité essentielle de la fiche de poste. L'accueil est donc une fonction qui concerne l'ensemble des agents : il s'agit d'une stratégie de service. L'accueil imprègne ainsi l'ensemble du fonctionnement de la bibliothèque (mobilier, documents d'information, signalétique...). L'agent d'accueil a donc pour mission de mettre en relation les usagers avec les collections et services de la bibliothèque. Il est alors médiateur, facilitateur et porteur des modalités de fonctionnement de l'établissement, afin de contribuer à sa compréhension par l'usager. Il est également garant du bon fonctionnement du service : la bibliothèque est un lieu de vivre ensemble, il est donc nécessaire de faire cohabiter les demandes diverses des usagers. Accueillir, c'est donc montrer aux visiteurs, usagers réguliers ou non, que ce lieu est à leur disposition et que le personnel est heureux de les voir. En bibliothèque, la fonction d'accueil est souvent liée à d'autres fonctions voisines : comptage des entrées, prêt / retour / inscriptions, surveillance, rangement… Or, la fonction d'accueil doit être prise au sérieux, car elle est le point de jonction entre le « front office » et le « back office », ou entre les salles de service public et le travail interne. C'est le service accueil qui recueille les réclamations du public et qui doit répondre pour tout ce qui est travail interne. La fonction accueil en bibliothèque est peu valorisée : en effet, les tâches dites nobles se situent davantage en travail interne : acquisitions, traitement documentaire… Puisque tout le monde fait de l'accueil, il s'agit de revaloriser cette fonction.
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23 Pour pouvoir assumer ces missions, les personnels de bibliothèque doivent être formés au domaine relationnel : prise de parole et expression orale, affirmation de soi et écoute de l'autre, accueil présentiel et téléphonique et gestion des situations de tension ou de conflit, ainsi que des formations plus spécifiques à l'accueil des publics non francophones ou handicapés.
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25 Les obligations de l'agent d'accueil sont celles d'un agent public : il a un devoir de discrétion quant aux données personnelles de l'usager, une obligation d'information, un devoir de neutralité et une obligation de réserve.
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27 Ici, il est important de noter que l'agent d'accueil doit faire attention à ne pas se positionner au-dessus de l'usager. On doit rester dans une conception transversale de l'accueil en bibliothèque.
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29 L'accueil est un acte personnel qui doit avoir pour leitmotiv la conviction que l'objet de son activité professionnelle est le visiteur, le demandeur, l'usager. Le bibliothécaire est alors non pas une interface anonyme mais un interlocuteur direct et valorisé.
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31 Accueillir est alors un processus actif : l'usager est un hôte, il doit systématiquement trouver une réponse à sa demande. La difficulté est alors qu'on se situe dans un accueil « multiple et unique », selon Bertrand Calenge dans //Accueillir, orienter, informer//, paru en 1999 : l'agent d'accueil est face à une multiplicité de demandes, tant dans leur forme que dans leur contenu, et il s'agit d'adopter un même professionnalisme pour donner une réponse qui soit celle du service et qui doit être adaptée. Accueillir, c'est alors faire preuve d'empathie, c'est-à-dire qu'il faut se mettre à la place de l'usager qui est face à soi, mais aussi de congruence, qui signifie s'adapter aux cadres de référence de son interlocuteur.
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33 Marielle de Miribel, dans //Accueillir les publics : comprendre et agir//, en 2013, parle du « Triangle de l'accueil ». Entre la bibliothèque organisatrice du service, le bibliothécaire qui met en œuvre le service et les publics qui sont destinataires du service doivent se jouer de façon cohérente les concepts d'adhésion, d'adéquation et d'implication relationnelle.
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37 == __**3. Les usagers en bibliothèque**__ ==
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39 Le rôle premier du bibliothécaire face à un usager est de parvenir à l'identifier, sans en faire un usager idéal. Il s'agit alors de savoir si l'usager est familier des bibliothèques, s'il est un nouvel arrivant, s'il est familier ou non des usages de la bibliothèque. Le bibliothécaire doit alors écouter, questionner (en privilégiant les questions courtes et directes) et reformuler la demande, afin de laisser s'exprimer les besoins de l'usager. La reformulation est un art difficile, qui consiste à ne pas introduire ses propres opinions.
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41 Les questions à se poser sont alors les suivantes : quel est le profil de l'usager ? Quel est le besoin d'information ? L'usager a-t-il des obligations de résultat, un travail à rendre ? De quel degré d'information a-t-il besoin ? C'est de cette manière que l'agent d'accueil se fait médiateur et facilitateur entre l'usager et les collections et services de la bibliothèque. L'usage du jargon bibliothéconomique doit être banni à ce stade : il s'agit d'adopter un langage adapté !
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43 Pour donner une réponse précise et efficace, il faut alors réunir les conditions suivantes : avoir une bonne connaissance de l'organisation des lieux, du service, des documents, des ressources, de l'environnement, ainsi qu'une bonne culturel générale, faire en sorte que l'usager ait connaissance de cette fonction d'information du bibliothécaire, avoir des outils techniques efficaces et disponibles rapidement et facilement.
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45 L'instauration du libre-accès en bibliothèque a placé les bibliothécaires dans une position inconfortable : il s'agit pour eux d'être au cœur d'un dispositif conçu pour se passer d'eux. L'objectif d'un bon accueil en bibliothèque est de rendre l'usager autonome. Pour y parvenir, les éléments suivants doivent être remplis : avoir une signalétique claire sur place, des collections facilement identifiables, et un site internet intuitif autant que possible. Le rôle du bibliothécaire est alors de permettre, grâce à une mise en espace réfléchie, aux usagers de trouver ce dont ils ont besoin et de leur donner l'impression qu'ils ont trouvé sans demander à quiconque. Il s'agit donc, de façon explicite ou non, de donner des clés aux usagers afin qu'ils puissent eux-mêmes satisfaire leurs besoins. Le bibliothécaire, l'intermédiaire, le médiateur, n'est plus visible directement, mais tout ce qu'il aura mis en œuvre dans l'agencement et la présentation des collections, des espaces et des services, fait de lui un médiateur efficace, même s'il est devenu invisible et que l'usager n'a plus besoin de lui. Le bibliothécaire est un accompagnant. Dans certaines bibliothèques se sont mis en place des actions de formation des usagers afin qu'ils comprennent les codes et les usages de la bibliothèque : formation à la recherche sur le catalogue ou sur internet, formation au classement… C'est cette tension entre formation et adaptation de la bibliothèque aux usagers qui fait la qualité de l'accueil en bibliothèque.
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47 Si le bibliothécaire est de plus en plus un médiateur invisible, qui prend de moins en moins de place dans l'espace bibliothèque, l'usager est quant à lui de plus en plus visible, et de nombreuses bibliothèques, pour mettre au centre l'usager, lui proposent de participer, d'être actif. Les modes de participation peuvent être nombreux : du cahier de suggestions d'acquisitions au chat en ligne sur l'amélioration des services ou le comité d'usagers pour construire un nouveau bâtiment, la bibliothèque est aujourd'hui de plus en plus une co-construction entre les citoyens, les élus et les bibliothécaires.
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49 == __**4. Les outils à disposition du bibliothécaire chargé d'accueil**__ ==
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51 Un projet de service qui met l'accueil au centre de ses préoccupations doit pouvoir produire et mettre à disposition de ses agents chargés de l'accueil des outils lui permettant de fournir un accueil de qualité.
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53 Le premier de ces éléments, et le plus important, est le règlement intérieur. Ce document, disponible pour les usagers en version intégrale ou sous forme de « guide », rassemble toutes les informations telles que les modalités d'inscription, les tarifs, les pénalités, le nombre de documents empruntables, leur durée… et est aussi un document de référence pour les droits et devoirs des usagers. C'est un document contractuel qui permet de poser les bases claires de la relation entre les usagers et la bibliothèque, via les bibliothécaires. Le règlement intérieur définit les règles d'accès et d'usages de la bibliothèque et prévoit également les sanctions éventuelles. Validé par la tutelle, il dispose d'une légitimité institutionnelle et constitue un vecteur de relation entre les usagers, les élus et le service. Cet acte administratif permet d'assurer le bon fonctionnement du service public.
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55 Ce règlement doit être visible par tous, même s'il suscite beaucoup moins d'intérêt qu'un guide du lecteur qui apporte des informations pratiques, non contraignantes, et sous une forme beaucoup moins administrative.
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57 Vue sous l'angle du règlement intérieur, la mission du bibliothécaire est une mission pédagogique et éducative, qui vise à énoncer l'implicite du fonctionnement de la bibliothèque pour le rendre explicite, afin que chaque usager s'approprie la bibliothèque avec un socle commun de codes et d'usages. C'est à cette condition d'un apprentissage partagé de l'institution que l'égalité des usagers devant le service public qu'est la bibliothèque sera respecté. Un travail sur la signalétique claire et lisible par tous – y compris par les publics qui n'ont pas accès à l'écrit, et qui mêle les usages autorisés des usages interdits, permettra de rendre acceptables les interdits car ils seront affichés pour tous.
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59 Un deuxième outil qui doit être mis à la disposition des agents d'accueil est un guide des procédures auquel on doit pouvoir se référer lorsqu'on a la moindre question et le moindre doute. Les informations qui y sont contenues doivent être claires, actualisées et faciles à trouver.
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61 == __**5. Accueillir les publics, c'est aussi prendre le risque des conflits et litiges.**__ ==
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63 Les litiges peuvent souvent traduire une méconnaissance ou d'un oubli des usagers quant aux règles du service, voire un malentendu. Ils peuvent aussi être le fruit non pas d'une méconnaissance mais d'un refus de reconnaissance de la règle ou d'une opposition à celle-ci : si la règle est considérée comme illégitime, elle ne sera pas acceptée. Ils peuvent enfin advenir lorsque la cohabitation des publics et des usages ne va pas de soi : la bibliothèque étant le lieu du vivre ensemble, les conflits sont aussi susceptibles d'apparaître, entre les usagers qui souhaitent du silence, ceux qui sont là pour jouer ou se rencontrer... Le rôle du bibliothécaire, selon Marielle de Miribel, est alors d'être garant de la limite, médiateur, régulateur, diplomate ou urgentiste.
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65 Une des pistes qui va dans le sens d'une amélioration de l'accueil peut alors être cherchée du côté de la différenciation des espaces : lorsque les locaux le permettent, avoir des espaces dévolus à des usages différents peuvent résoudre une partie des conflits d'usages. La difficulté est alors bien, pour réaliser un accueil de qualité, de concilier standardisation et personnalisation du service.
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67 On peut ici noter que si le non-respect de la règle a une incidence nulle sur le service, le bibliothécaire, en équipe, peut alors s'interroger sur la pertinence de cette règle, et la supprimer le cas échéant.
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69 Lorsque le conflit est en cours, il s'agit pour le bibliothécaire chargé de l'accueil de trouver des solutions. Il est alors nécessaire de distinguer les faits des sentiments et des opinions. Un fait est un facteur objectif, vérifiable et incontestable. Un sentiment est un vécu personnel dont on ne peut faire abstraction et une opinion est une idée personnelle sur un sujet, c'est-à-dire un jugement porté sur la réalité. La difficulté pour le bibliothécaire est alors de rester dans le domaine des faits : il s'agit de mettre de côté ce qui le constitue personnellement pour n'être plus que dans la posture de neutralité de l'agent d'accueil. Un des moyens qui permettent de parvenir à rester dans le domaine des faits est alors de travailler en équipe, et de construire une réponse collective au problème. Cette démarche permet de prendre du recul par rapport au conflit, de prendre connaissance des différentes manières d'intervenir, de se sentir soutenu par ses collègues et sa hiérarchie, mais aussi de donner à l'usager la position de l'établissement et non celle, individuelle, de l'agent d'accueil qui est face à lui. Certaines bibliothèques se saisissent de chaque incident pour formaliser la procédure en cas de litige, ce qui permet à chaque agent d'accueil de répondre de manière outillée, comme dans les cas où il n'y a pas de conflit.
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