L'Etat garant de la solidarité nationale

Modifié le 16 mai 2023

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Dernière mise à jour : septembre 2019

L’État est un moteur important des politiques sociales (I). Il mobilise une multitude d’acteurs et d’organes dans le but de garantir la cohésion et la solidarité nationale (II).

1. L’État, moteur important des politiques sociales

1.1. Une prérogative défendue par les chefs d’État

Depuis le début des années 1980 et les premières lois de décentralisation, les collectivités locales voient leurs compétences renforcées en matière sociale. Les Présidents de la République qui se sont succédé depuis cette époque affirment périodiquement que l’État n’abandonne pas pour autant ses prérogatives de garant de la cohésion sociale et de la solidarité nationale :

  • En 1986, François Mitterrand déclarait ainsi être « le garant de la cohésion sociale [et] de la cohésion nationale ».
  • Le candidat Jacques Chirac avait quant à lui bâti sa campagne présidentielle de 1995 sur la volonté de réduire la « fracture sociale ». C’est d’ailleurs sous son mandat qu’a été adoptée la loi du 18 janvier 2005 « de programmation pour la cohésion sociale ».
  • De son côté, François Hollande avait affiché sa volonté de renforcer la solidarité nationale. Pour ce faire, il avait instauré une nouvelle méthode - les « grandes conférences sociales » - afin d’améliorer la discussion et la concertation sur des sujets sociaux d’actualité.
  • Dans un discours du 13 septembre 2018, Emmanuel Macron affirmait vouloir « que l’État se réinvestisse sur ce sujet de la solidarité et de l’accès à l’emploi ». Selon le Président de la République, « en matière de solidarité, d’accompagnement des plus fragiles vers l’insertion, de travail, de dignité, l’État doit donc reprendre toute sa place ».

1.2. Les matières sociales réservées à l’État

L’article L. 121-7 du Code de l’action sociale et des familles dresse une liste de huit domaines qui relèvent de la solidarité nationale et pour lesquels l’État est compétent.

Ainsi, sont à la charge de l’État :

  • Les dépenses d’hébergement engagées en faveur des personnes sans abri et des personnes âgées en perte d’autonomie ;
  • Les frais d’aide médicale d’État, c’est-à-dire les frais de santé engagés en faveur des personnes en situation irrégulière et de grande précarité ;
  • Les aides de fin d’année qui peuvent être notamment accordées aux allocataires du RSA ;
  • Les aides relatives au maintien à domicile des personnes âgées ;
  • L’allocation différentielle aux adultes handicapés ;
  • Les frais d’hébergement, d’entretien et de formation professionnelle des personnes handicapées dans les établissements de rééducation professionnelle ;
  • Les mesures d’aide sociale en matière de logement, d’hébergement et de réinsertion ;
  • L’allocation aux familles dont les soutiens indispensables accomplissent le service national.

L’État prend également en charge des prestations de solidarité qui ne sont pas régies par le Code de l’action sociale et des familles comme l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) -- art. L. 821-5 CSS - ou l’Allocation de Solidarité Spécifique (ASS).

Au fil du temps, de nouvelles compétences sociales sont régulièrement reconnues à l’État. Ainsi, la loi du 30 juin 2004 fait obligation à l’État et au Président du Conseil général d’arrêter un plan d’alerte et d’urgence au profit des personnes âgées et des personnes handicapées en cas de risques exceptionnels. Autre exemple, la loi du 5 mars 2007 confie à l’État le soin de garantir le droit à un logement décent et indépendant à toute personne qui, résidant sur le territoire français de façon régulière, n’est pas en mesure d’y accéder par ses propres moyens ou de s’y maintenir.

2. Panorama des organes de l’État chargés de garantir la solidarité nationale

Les organes de l’État chargés de garantir la solidarité nationale, c’est-à-dire de concevoir, de mettre en œuvre et de contrôler les politiques sociales sont extrêmement nombreux et variés. Ils peuvent être regroupés en fonction de leur niveau d’implantation : central, régional, départemental.

2.1. Les services centraux de l’État

2.1.1. Les ministères sociaux

Les politiques sociales de l’État se structurent traditionnellement en quatre pôles : un pôle « travail-emploi-formation professionnelle », un pôle « Sécurité sociale », un pôle « santé » et un pôle « aide et action sociales ».

La responsabilité de ces quatre grands ensembles peut être confiée à un grand ministère des Affaires sociales ou, comme ce fût plus souvent le cas sous la Vème République, relever de plusieurs ministères, lesquels pouvant eux-mêmes être subdivisés en secrétariats d’État. Actuellement, l’action publique du gouvernement est articulée autour de deux ministères « sociaux » :

  • Le ministère du Travail, confié à la ministre Muriel Pénicaud ;
  • Le ministère des Solidarités et de la Santé, confié à la ministre Agnès Buzyn.

Bien qu’ils ne soient pas spécialisés sur ces thématiques, d’autres ministères peuvent être amenés à traiter de questions sociales. C’est le cas par exemple du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales qui pourra notamment se prononcer sur les mesures d’hébergement en faveur des plus démunis.

2.1.2. Les administrations centrales

Les ministères sociaux sont des structures particulièrement instables qui se créent et disparaissent au gré des alternances politiques. Fort heureusement, les politiques sociales sont surtout le fait d’administrations centrales dont la stabilité n’est pas souvent remise en cause.

Le décret du 1er juillet 1992 « portant charte de la déconcentration » indique que les administrations centrales sont chargées de la conception, de l’animation, de l’orientation, de l’évaluation et du contrôle des politiques publiques. Pour cela, elles participent à l’élaboration des projets de loi et de décret et mettent en œuvre les décisions du Gouvernement. Ces administrations sont nombreuses et ont des compétences très variées. Dans le domaine social, les plus importantes sont :

Le Secrétariat Général des Ministères chargés des Affaires Sociales (SGMAS) 

Le SGMAS assure la logistique et coordonne l’action des ministères sociaux. Il regroupe 4 directions, 3 délégations et 1 bureau :

  • La Direction des Ressources Humaines (DRH) ;
  • La Direction des Finances, des Achats et des Services (DFAS) ;
  • La Direction des Systèmes d’Information (DSI) ;
  • La Direction des Affaires Juridiques (DAJ) ;
  • La Délégation aux Affaires Européennes et Internationales (DAEI) ;
  • La Délégation à l’Information et à la Communication (DICOM) ;
  • La Délégation à la Stratégie des Systèmes d’Information de Santé (DSSIS) ;
  • Le Bureau de la Communication de la Jeunesse et des Sports (BCOMJS).

La Direction Générale de la Cohésion Sociale (DGCS)

La DGCS a été créée par un décret du 25 janvier 2010 en fusionnant diverses administrations qui intervenaient jusque-là dans des domaines très proches : la Direction Générale de l’Action Sociale (DGAS), la Délégation Interministérielle à la Famille (DIF), la Délégation Interministérielle à l’Innovation, à l’Expérimentation Sociale et à l’Économie Sociale (DIIESES), le Service des Droits des Femmes et de l’Égalité (SDFE) et la Délégation Interministérielle aux Personnes Handicapées (DIPH).

La Direction générale de la cohésion sociale est chargée de la conception, du pilotage et de l’évaluation des politiques publiques de solidarité, de développement social et de promotion de l’égalité favorisant la cohésion sociale.

Concrètement, la DGCS intervient en matière :

  • d’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées ;
  • d’égalité entre les hommes et les femmes et de promotion des droits des femmes ;
  • de politique familiale et de protection de l’enfance et des personnes vulnérables ;
  • de prévention et de lutte contre la pauvreté et l’exclusion ;
  • d’hébergement et d’accès au logement des personnes sans abri ou mal logées ;
  • de promotion de l’innovation et de l’expérimentation sociale, notamment au sein de l’économie sociale et solidaire.

L’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS)

L’IGAS est un corps de contrôle des ministères sociaux créé en 1967. Elle a trois missions principales :

  • Contrôler les administrations et les organismes sociaux ;
  • Évaluer la mise en œuvre des politiques sociales ;
  • Apporter conseils et expertise au Gouvernement en matière sociale ;

Afin de mener à bien ses missions de contrôle, d’évaluation et de conseil, l’IGAS est tenue de rendre périodiquement des rapports dans 6 domaines spécifiques : cohésion sociale ; travail et formation professionnelle ; protection sociale ; santé ; générosité publique ; organisation de l’État.

La Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques (DREES)

La DREES a été mise en place par le décret du 30 novembre 1998. Elle est actuellement placée sous la tutelle du ministère du Travail, du ministère des Solidarités et de la Santé, et du ministère de l’Action et des comptes publics. Sa mission principale consiste à doter ses ministères de tutelle, les services déconcentrés de l’État ainsi que les établissements, organismes et agences qui leur sont rattachés, d’une meilleure capacité d’observation, d’expertise et d’évaluation sur leur action et leur environnement.

À ce titre :

  • Elle est chargée de la conception de l’appareil statistique et assure la collecte, l’exploitation et la diffusion des statistiques sociales ;
  • Elle oriente, avec les autres instances spécialisées, la politique de recherche en matière sociale ;
  • Elle effectue des travaux de synthèse, en particulier des comptes de la santé et de la protection sociale et dresse des bilans de la situation de la population en matière sanitaire et sociale.

En dehors des quatre administrations spécialisées que sont le SGMAS, l’IGAS, la DGCS et la DREES, d’autres structures centrales peuvent être amenées à intervenir et à se prononcer ponctuellement sur des questions relevant de la solidarité nationale. Ainsi, bien que l’aide et l’action sociales ne fassent pas partie de leurs attributions principales, la Direction Générale du Travail (DGT), la Direction Générale de la Santé (DGS) ou encore la Direction de la Sécurité Sociale (DSS) sont parfois mises à contribution sur ces thématiques.

2.1.3. Les Conseils, Comités et Observatoires nationaux

De nombreuses instances nationales – Conseils, Comités et Observatoires – ont été créées et placées sous l’autorité ou la tutelle des ministères en charge des Affaires sociales. Ces instances ont pour principale fonction l’étude et le conseil de toutes les autorités en charge des politiques sociales. Les plus importantes sont :

  • Le Haut Conseil du travail social ;
  • Le Conseil national consultatif des personnes handicapées ;
  • Le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale ;
  • Le Comité national des retraités et des personnes âgées ;
  • L’Observatoire national de l’action sociale ;
  • L’Observatoire national de la protection de l’enfance ;
  • L’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale ;
  • L’Observatoire national de la politique de la ville.

2.2. Les services déconcentrés de l’État

2.2.1. L’instabilité des services déconcentrés de l’État

La mise en œuvre des politiques sociales est assurée par des structures déconcentrées de l’État, implantées au niveau régional et départemental. La nature de ces structures, de leurs attributions et de leurs modalités de fonctionnement a beaucoup évolué au cours de ces dernières décennies :

  • En 1964, la mise en œuvre des actions sociales de l’État a été confiée au niveau régional à des Services Régionaux d’Action Sanitaire et Sociale (SRASS).
  • La même année, deux décrets sont venus regrouper les services locaux existants afin de former des Directions Départementales de l’Action Sanitaire et Sociale (DDASS).
  • Le décret du 22 avril 1977 a supprimé les SRASS et a transféré leurs compétences à des Directions Régionales de l’Action Sanitaire et Sociale (DRASS).
  • Dans les années 1980, sous l’effet du renforcement du mouvement de décentralisation et des mutations des politiques d’action sociale (avec en particulier l’apparition et le développement du concept d’« insertion sociale »), il a fallu redéfinir les missions des services déconcentrés de l’État et aménager une nouvelle répartition des compétences entre le territoire régional et le territoire départemental. C’est dans ce cadre qu’ont été mises en place de façon expérimentale trois Directions Régionales et Interdépartementales de la Santé et de la Solidarité (DRISS) entre 1991 et 1993. L’objectif était de regrouper dans une entité unique des services dispersés entre la région et les départements.
  • Devant l’échec de ce dispositif, les structures régionales et départementales ont été conservées. Un décret du 6 décembre 1994 est toutefois venu redéfinir les compétences respectives des DRASS et des DDASS et coordonner leurs actions.
  • Deux ans plus tard, les ordonnances « Juppé » ont permis la création d’Agences Régionales de l’Hospitalisation (ARH) chargées de mettre en œuvre la réforme hospitalière dans ses volets financiers, de planification et d’amélioration de la qualité des soins. La mise en place de cette structure a privé les autres services déconcentrés de l’État d’une part importante de leur activité.

Il faudra toutefois attendre l’adoption de la loi dite « HPST » (Hôpital, Patients, Santé et Territoire) du 21 juillet 2009 et la Réorganisation de l’Administration Territoriale de l’État (RéATE) de 2010 pour que l’organisation des services déconcentrés de l’État soit profondément modifiée.

2.2.2. Les structures régionales actuelles

Depuis le 1er janvier 2010, les DRASS et les ARH ont disparu. L’action sociale de l’État est dorénavant mise en œuvre au niveau régional par deux entités :

Les Directions Régionales de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale (DRJSCS)

Les DRJSCS sont le résultat de la fusion de la Direction régionale de la jeunesse et des sports, de la Direction régionale de l’agence nationale pour la cohésion sociale et pour l’égalité des chances, et des services des DRASS qui n’ont pas été transférés aux ARS.

Elles interviennent dans 3 grands domaines : les politiques sociales, les politiques sportives, et les politiques de jeunesse, de vie associative, et d’éducation populaire. Les politiques sociales portent notamment sur la prévention et la lutte contre les exclusions, la protection des personnes vulnérables et leur accès à l’hébergement, l’intégration sociale des personnes handicapées, les actions sociales de la politique de la ville, la prévention et la lutte contre les discriminations, la promotion de l’égalité des chances, la certification dans les domaines des professions sociales et des professions de santé non médicales.

La loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions a eu un impact direct sur les services déconcentrés de l’État. Ainsi, depuis le 1er janvier 2016, la DRJSCS et la Direction Départementale de la Cohésion Sociale (DDCS) ont fusionné dans 8 des 13 régions métropolitaines pour donner naissance à une Direction Régionale et Départementale de la Jeunesse, des Sports, et de la Cohésion Sociale (DRDJSCS). Dans les 5 autres régions, les deux structures continuent de coexister.

Les Agences Régionales de Santé (ARS)

Les ARS ont deux missions principales. D’une part, elles assurent à l’échelon régional le pilotage de la politique de santé publique, c’est-à-dire qu’elles :

  • Mettent en place des veilles sanitaires ;
  • Définissent, financent et évaluent des actions de prévention et de promotion de la santé ;
  • Anticipent, préparent et gèrent les crises sanitaires.

D’autre part, les ARS sont chargées de réguler l’offre de soin en région. Cela signifie qu’elles doivent notamment :

  • Coordonner l’activité et attribuer le budget des hôpitaux, cliniques, centres de soins et structures d’accueil pour personnes âgées, handicapées et/ou dépendantes ;
  • Veiller à améliorer la répartition des médecins et de l’offre de soins sur le territoire ;
  • Autoriser la création d’établissements de soins et médico-sociaux, contrôler leur fonctionnement et leur allouer des financements.

La fusion des régions françaises s’est accompagnée d’une fusion des ARS au 1er janvier 2016. Il existe actuellement 17 ARS (13 en France métropolitaine + 4 outre-mer).

2.2.3. Les structures départementales actuelles

La RéATE a également impacté les services départementaux de l’État. Les DDASS ont été supprimées. L’action sociale de l’État peut désormais être mise en œuvre par trois structures, en fonction la taille du département.

Dans les départements de moins de 400 000 habitants, les attributions sociales des DDASS ont été transférées à des Directions Départementales de la Cohésion Sociale et de la Protection des Populations (DDCSPP).

Dans les départements de plus de 400 000 habitants, les DDCSPP sont divisées en deux structures distinctes : les Directions Départementales de la Cohésion Sociale (DDCS) et les Directions Départementales de la Protection de la Population (DDPP).

En définitive, les organes de l’État chargés de concevoir, de mettre en œuvre et de contrôler les politiques sociales sont extrêmement variés.

Un mouvement a été initié ces dernières années – Révision Générale des Politiques Publiques (2007), loi « HPST » (2009), Réorganisation de l’Administration Territoriale de l’État (2010), Modernisation de l’Action Publique (2012) - afin de réformer l’organisation administrative. Ce mouvement vise à rationaliser les dispositifs centraux (fusion de certaines directions, modification des tutelles, etc.) et à renforcer les compétences régionales de l’État, au détriment de ses structures départementales.

Références bibliographiques

  • Agence régionale de santé, Qu’est-ce qu’une agence régionale de santé [en ligne], disponible sur www.ars.sante.fr
  • AUBIN (E.), Droit de l’aide et de l’action sociales, Issy-les-Moulineaux : Gualino, 4e éd., 2014, 521 p.
  • BORGETTO (M.) et LAFORE (R.), Droit de l’aide et de l’action sociales, Issy-les-Moulineaux : LGDJ, 10e éd., 2018, 819 p.
  • DAVID (F.), « Le Président de la République, garant de la cohésion sociale », Revue française de droit constitutionnel n° 3, 2004, p. 533-566.
  • LOCHEN (V.), Comprendre les politiques sociales, Paris : Dunod, 5e éd., 2016, 458 p.
  • Ministère des Solidarités et de la Santé, Directions [en ligne], disponible sur www.solidarites-sante.gouv.fr

Auteur(s) :

URBAIN Bastien

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